L'INDOCHINE ET LE COUP DE FORCE JAPONAIS DU 9 MARS 1945


LA PAGE DE PATRICK-GILLES LE ROUX

Patrick-Gilles LE ROUX est le petit-fils de l'adjudant-chef Sébastien HÉNAFF, sous-officier en poste à Hanoi et blessé lors du coup de force japonais. Il nous fait part de la carrière militaire de son grand-père.


Adjudant-chef Sébastien HÉNAFF

En mars 1945, l'adjudant-chef Sébastien HÉNAFF est affecté au 4ème RAC à Hanoi. Détaché à l'État-Major (1er Bureau) du COMARTI (Commandement de l'Artillerie), il est considéré comme un secrétaire consciencieux, très averti de toutes les questions relatives au personnel et aux effectifs. Depuis 1944 il est inscrit au tableau d'avancement pour le grade de sous-lieutenant.

Au soir du 9 mars, l'adjudant-chef HÉNAFF est à l'État-Major du Commandement de l'Artillerie. Lorsque les premières détonations se font entendre, il conduit le général MASSIMI jusqu'à la Citadelle sur le porte-bagage de sa bicyclette. (Dans son rapport officiel le général François MASSIMI déclarera avoir rejoint la Citadelle en voiture).

Ne disposant pas d'indications précises, il semble cependant que l'Adjudant-chef HÉNAFF soit rapidement retourné prendre son poste au COMARTI. Le lendemain, probablement en matinée, le Commandement de l'Artillerie ne faisant pas l'objet d'attaque particulière de la part des Japonais, il constitue un groupe de combat dont il prend le commandement, avec l'objectif de forcer le passage, l'arme à la main, jusqu'à la Citadelle. Lors de cette tentative, l'adjudant-chef HÉNAFF est grièvement blessé par un vingtaine d'éclats de grenade en franchissant la grille d'enceinte du 1er RTT.

Dans le coma, abandonné sur place comme mort, il sera ramassé soixante heures plus tard par des brancardiers chargés des cadavres. Dirigé vers la morgue de l'hôpital indigène Yersin, l'adjudant-chef HÉNAFF retrouvera ses esprits auprès de nombre d'amis morts... S'en suivront les premiers soins pour traumatisme crânien, hémorragie, septicémie... par un médecin tonkinois ne disposant plus de médicaments, ni d'instruments de chirurgie stérilisés.

Ce sera ensuite six mois d'internement au camp de représaillles de Hoa-Binh, avec ses mauvais traitements... et son cortège de séquelles.

Pour son comportement lors des combats des 9 et 10 mars, l'adjudant-chef HÉNAFF est cité à l'ordre de la division avec attribution de la Croix de Guerre (ordre général n°256 du général de Corps d'Armée LECLERC, Commandant supérieur des Troupes Françaises en Extrème Orient) :

HÉNAFF, Sébastien - Mle 5920 - Adjudant-Chef du 4ème RAC :

Le 10 mars 1945, lors de l'attaque de la Citadelle d'Hanoi, son bâtiment n'ayant pas été l'objet d'une menace directe des troupes japonaises, a rassemblé divers personnels isolés et constitué un groupe de combat à la tête duquel il s'est efforcé de rejoindre la Citadelle encerclée, en s'ouvrant en plein jour un passage par le feu. A été grièvement blessé au moment où il réussissait, sous la protection des feux de la défense, à atteindre l'enceinte du quartier du 1er Tonkinois déjà investi par l'ennemi.

Cette citation comporte l'attribution de la Croix de Guerre 1939-1945 avec étoile d'argent.

Sébastien HÉNAFF est également titulaire (de haut en bas et de gauche à droite) :

L'adjudant-chef HÉNAFF devait être nommé sous-lieutenant au 25 mars 1945, mais ayant été réformé pour raison de santé suite aux blessures et mauvais traitements reçus, il n'en sera pas tenu compte : il quitte l'Armée, après avoir servi deux ans au Levant et plus  de dix ans en Indochine, avec une pension d'invalidité de 80%.

Classé pour un emploi réservé, il est nommé commis administratif en avril 1952 et affecté à l'État-Major de la 10ème Région Militaire à Alger. Il va servir dans cet État-Major jusqu'en octobre 1962, date de son rapatriement en Métropole.

La carrière de l'adjudant-chef HÉNAFF va se poursuivre à Rennes (Bureau de Recrutement), puis à Quimper (Centre Mobilisateur 118). Nommé Agent Administratif à compter du 1er octobre 1968, il atteint la limite d'âge le 22 février 1974. Lors de sa mise à la retraite, le détachement militaire du CM 118, caserne de la Tour d'Auvergne de Quimper, lui rendra les honneurs.

Peu avant son décès, le commandement militaire proposa l'adjudant-chef Sébastien HÉNAFF pour l'Ordre National du Mérite.