LES FUSILIERS MARINS PENDANT LA GUERRE 1914-1918





L'histoire des fusiliers marins lors de la première guerre mondiale peut se décomposer en deux périodes distinctes : celle de la Brigade des Fusiliers Marins (environ 6 400 hommes) qui commence avec le début de la guerre, et s'arrète avec sa dissolution en novembre 1915, la marine ayant besoin de ses marins ; et celle du Bataillon des Fusiliers Marins (environ 850 hommes) qui prend sa relève en novembre 1915 et va assurer jusqu'à la fin de la guerre la présence du drapeau des Fusiliers Marins dans les tranchées.

Jules Dréan, le grand-père de Marie-Armelle est mobilisé le 15 mars 1915, et affecté au Bataillon des Fusiliers Marins le 1er décembre 1915. Il va participer à la plupart des combats où se sont illustrés les Fusiliers Marins de 1916 jusqu'à la fin de la guerre, notamment ceux de Hailles (1918) et de Moulin-de-Laffaux (1918).


Les éléments les plus marquants concernant la Brigade des Fusiliers-Marins, pour la période allant de fin octobre 1914 à novembre 1915, sont racontés par l'Amiral Ronarc'h :







La Brigade des Fusiliers Marins (1914-1915)



Lorsque la guerre éclate, la Marine dispose d'un surplus d'effectif de plusieurs milliers d'hommes qu'elle ne peut pas utiliser à bord de ses bâtiments. Le 7 août, les 1er et 2ème régiments de fusiliers marins sont créés, dans le but de combattre à terre. Réunis en une brigade forte de 6 000 hommes, sous le commandement du jeune contre-amiral Ronarc'h, leur mission initiale est la défense de la Capitale et de sa banlieue.


Après lecture du document « La Brigade des Fusiliers Marins sur l'Yser, par l'Amiral Ronarc'h », on peut en déduire l'organisation suivante pour la Brigade des Fusiliers Marins en 1915 :
    • La brigade est constituée de l'Etat-Major de la Brigade et de deux régiments. Elle dispose d'une compagnie de mitrailleuses de 15 sections.
    • Chaque régiment est composé d'un état-major, de 3 bataillons, et d'une ambulance. Un régiment est commandé par un Capitaine de Vaisseau.
    • Chaque bataillon est commandé par un Capitaine de Frégate et est divisé en quatre compagnies.
    • L'effectif d'une compagnie est de l'ordre de 200 hommes.
La structuration des régiments de la Brigade des marins est donc voisine de celle des régiments d'infanterie de 1914, à l'exception des sections de mitrailleuses qui semblent plus nombreuses, et regroupées en une compagnie au niveau de la Brigade.

Le 17 août 1914, peloton de liaison cycliste en tête, les fusiliers marins de Lorient défilent sur le cours de Chazelles avant de prendre le train pour Paris. Il s’agit notamment des 700 apprentis fusiliers marins (les plus jeunes ont à peine seize ans et demi), de leurs instructeurs et des réservistes du dépôt de Lorient, anciens chauffeurs ou mécaniciens de la flotte. L’extrême jeunesse de ces soldats surprend les Parisiens qui leur donnent le surnom de « Demoiselles de la Marine ». Pour les Allemands, aussi surpris, ce seront les « Demoiselles au pompon rouge ». Ils sont bientôt rejoints à Paris par des renforts arrivant des autres ports de mer : Rochefort, Brest, Cherbourg et Toulon. Ces nouveaux contingents intègrent de nouvelles recrues qui étaient il y a encore peu des marins au long cours, pêcheurs ou caboteurs, et qui se transforment peu à peu en soldats, remplaçant par la capote le col ou la vareuse, acrochant des cartouchières au ceinturon.


Fusiliers marins renforçant le service d'ordre dans les rues de Paris


Le 2 octobre, ils quittent, sous les acclamations de Parisiens, le Grand Palais pour s'en aller dans le secteur nord-ouest de la défense, vers le fort de Gonesse. Dans le nord, les Allemands menacent de bousculer les défenses belges, la défense de Paris n'est plus à l'ordre du jour ; la brigade doit se porter au-devant de l'ennemi dans les Flandres pour bloquer le passage vers la mer.

Le 7 octobre, sept trains les emportent de Saint-Denis et de Villetaneuse vers le front, en Flandres. A peine arrivée à Dunkerque, la brigade repart vers Anvers. A Gand, elle reçoit l'ordre de descendre du train, la voie étant coupée au delà.

Les fusiliers marins se battent les 9, 10 et 11 octobre pour protéger la retraite des troupes qui évacuent Anvers, puis décrochent vers Dixmude qu’ils atteignent le 15 octobre après une marche épuisante. Poursuivis par cinquante mille allemands, ces hommes habitués à vivre nu-pieds sur le pont de leurs bateaux, fournissent des marches de trente et quarante kilomètres. Le lendemain, 16 octobre, la ligne de défense des marins est à peine établie que les Allemands déclenchent à 16 heures leur première attaque par artillerie et infanterie. Les combats pour la possession de Dixmude viennent de commencer, opposant les 6 000 marins de l'Amiral Ronac'h et les 5 000 belges du Général Meiser à trois corps d'armées allemands, sous les ordres du Prince de Würtemberg.

Le même jour, les Etats-Majors français et belges se rencontrent, et compte tenu de l'évolution de la situation, pensent qu'il est désormais possible d’arrêter l’invasion allemande le long de la côte. Le Général Foch raconte :


« On tiendra pour cela sur l’Yser, de la Mer du Nord à Dixmude, avec l’armée belge rapidement reconstituée ; au point d’appui de Dixmude, avec la brigade de fusiliers marins ; sur l’Yperlé, plus au sud, et jusqu’à Ypres avec les troupes territoriales qui s’y trouvent déjà et que je renforce rapidement de divisions de cavalerie. On attendra dans ces conditions l’arrivée des renforts français que le général en chef nous fait espérer. Dans cet ordre d’idées, et avant de quitter Furnes dans la soirée du 16, j’adresse à la hâte à l’Amiral Ronarc’h une instruction lui fixant sa tâche à Dixmude :


Dans les circonstances où nous sommes, la tactique que vous avez à pratiquer ne comporte pas d’idée de manœuvre, mais simplement et au plus haut point, l’idée de résister là où vous êtes.
Dans ce but, il y a lieu de préparer sans aucune réserve la mise en œuvre, dans une situation abritée, et de bonnes conditions, de tous vos moyens.
Quant à la conduite à tenir, elle consiste pour vous à arrêter net l’ennemi, par la puissance de vos feux en particulier.
C’est dire qu’elle est facile à tenir avec les effectifs et les moyens dont vous disposez, qu’elle vous permet d’occuper une grande étendue de terrain et que vous ne devez songer à évacuer la position que sur un ordre formel de vos supérieurs ou à la suite de l’enlèvement de « toute » la position par l’ennemi.
Inutile de dire que je compte entièrement sur votre dévouement pour remplir cette mission.

L’amiral va, avec ses marins, remplir cette tâche d’une façon des plus glorieuses. »


L'Amiral Ronarc'h donne l'ordre suivant à ses marins : « Le rôle que vous avez à remplir est de sauver notre aile gauche jusqu'à l'arrivée des renforts. Sacrifiez-vous. Tenez au moins quatre jours. »

Le 24 octobre à 9 heures du soir, le Prince de Würtemberg lance une attaque générale avec comme objectif « d'enlever la décision » et de percer le front en direction de Furnes. Deux colonnes vont assaillir le front Nieuport-Dixmude tenu par les Belges et deux autres colonnes faire converger leurs efforts vers Dixmude, accompagnées d'une formidable artillerie.

Le 26 octobre, les marins sont renforcés par un Régiment de Marche de Tirailleurs Sénégalais aux ordres du Commandant, puis Lieutenant-Colonel Pelletier. Ce régiment est constitué de deux bataillons : le 3ème BTS du Maroc (Commandant Frèrejean) et le 1er BTS d'Algérie (Commandant Brochot).

Le 28 octobre, suite à une décision du 25, les Belges inondent la rive gauche de l'Yser entre ce fleuve et la chaussée de chemin de fer de Dixmude à Nieuport, faisant de Dixmude, à l'extrémité de cette lagune artificielle, une presqu'île, « un Quiberon du Nord à l'ancre sur une mer immobile, sans flux ni reflux, piquée de têtes d'arbres, de toits de fermes noyées, et promenant sur ses eaux mortes, au fil d'une insensible dérive, des cadavres ballonés de soldats et d'animaux, de casques à pointe, des culots de cartouche et des boîtes de conserves vides ... ». Ces inondations sauvent la situation sur l'Yser.

Le 10 novembre, les défenseurs de Dixmude sont contraints, après d'âpres combats qui se terminent en de sanglants corps à corps à la baïonnette ou au couteau, d'abandonner la ville en feu et de repasser sur la rive gauche de l’Yser où ils occupent une position précédemment organisée, mais dont les tranchées ne peuvent pas avoir plus d'un mètre de profondeur tant la nappe d'eau est proche. Ils devaient tenir la ville pendant quatre jours, ils l’auront tenue plus de trois semaines, face à 50 000 Allemands qui laissèrent 10 000 des leurs dans la plaine environnante et eurent plus de 4 000 blessés.

Les pertes des défenseurs sont également effroyables. Les marins ont plus de 3 000 hommes morts ou hors de combat : 23 officiers, 37 officiers mariniers et 450 quartiers maîtres et matelots ont été tués ; 52 officiers, 108 officiers mariniers et 1 774 quartiers maîtres et matelots sont blessés ; 698 d'entre eux ont été faits prisonniers ou portés disparus. Concernant les Tirailleurs Sénégalais, il reste 400 hommes au Bataillon Frèrejean et seulement 11, dont un capitaine, au Bataillon Brochot - 411 survivants sur 2 000.

Le 15 novembre, l'offensive allemande entammée trois mois auparavant, est définitivement stoppée.

Le sacrifice de la brigade Ronarc'h eut un grand retentissement en France, et on s'aperçut alors que cette unité héroïque n'avait même pas de drapeau ! Le 11 janvier, la brigade de marins, massée sur un terrain vague de Saint Pol, près de Dunkerque, est passée en revue par M. Raymond Poincarré, Président de la République, accompagné de M. Victor Augagneur, Ministre de la Marine. Le Président remet solennellement à l'Amiral Ronarc'h, le drapeau des fusiliers marins, dont la garde est confiée au deuxième régiment. Aux survivants de la brigade il déclare :


« Fusiliers Marins, mes Amis, Le drapeau que le gouvernement de la République vous remet aujourd'hui, c'est vous mêmes qui l'avez gagné sur les champs de bataille. Vous vous êtes montrés dignes de le recevoir et de le défendre. Voilà de longues semaines qu'étroitement unis à vos camarades de l'armée de terre, vous soutenez victorieusement, comme eux, la lutte la plus âpre et la plus sanglante ... Ce sont les plus lointaines destinées de la patrie et de l'humanité qui s'inscrivent, en ce moment, sur le livre d'or de l'armée française. Notre race, notre civilisation, notre idéal sont l'enjeu sacré des batailles que vous livrez. Quelques mois de patience, de résistance morale et d'énergie vont décider des siècles futurs. En conduisant ce drapeau à la victoire, vous ne vengerez pas seulement nos morts, vous mériterez l'admiration du monde et la reconnaissance de la postérité.

Vive la République ! Vive la France ! »



Fin janvier 1915, la Brigade des Fusiliers Marins s'installe dans le secteur de Nieuport.

De janvier à mai 1915, les fronts allemands et français dans les Flandres vont progressivement se stabiliser ; et ce jusqu'à l'offensive alliée de juillet 1917.

En novembre 1915, le gouvernement décide de dissoudre la brigade, la Marine ayant besoin de ses personnels pour lutter contre les sous-marins allemands. Après discussion, il est décidé que le drapeau des fusiliers-marins restera au front des armées avec un bataillon, une compagnie de pontonniers et huit sections de mitrailleuses. Le rôle des deux régiments est clos le 10 décembre 1915.

Pendant les seize mois qu'elle a passés au front des armées, la brigade, qui était majoritairement composée de Bretons, a perdu, en tués, blessés ou disparus, 172 officiers, 346 officiers mariniers et environ 6 000 quartiers maîtres et marins, soit la totalité de son effectif normal.






L'Amiral RONARC'H


Pierre Alexis Ronarc’h est né à Quimper en 1865 dans une famille d’hommes de loi. Il entre à l’école navale en 1880. Une blessure lors des opérations de conquête des Comores en 1886 lui vaut une citation.

Promu lieutenant de vaisseau en 1890, puis admis en 1898 à la toute nouvelle Ecole des hautes études de la marine, il est nommé en 1899 aide de camp de l’amiral commandant en chef de la division d’extrême Orient, et se trouve donc impliqué dans les graves tensions de l’époque entre la Chine et les puissances occidentales, suite à la révolte des Boxers (1900-1901).

En 1908, il est promu capitaine de vaisseau et prend les fonctions de major général de la marine à Rochefort. L'année suivante, il est à Lorient. Il y surveille l'achèvement des travaux du Waldeck-Rousseau.

Après divers embarquements en Méditerranée, il est chargé en 1910 du commandement des torpilleurs et sous-marins de la défense fixe de Brest : son action lui vaut en juin 1914 ses étoiles de contre-amiral, à 49 ans.

Lorsque la guerre éclate en août 1914, il reçoit le commandement de la brigade des fusiliers-marins.  En novembre 1915 il est nommé vice-amiral, date à laquelle il abandonne le commandemant de la brigade des fusiliers-marins qui est dissoute.

Il se distingue en 1916, à la tête des forces navales de la zone nord, chargé d'assurer, en étroite coopération avec la Royal Navy, la protection des convois qui traversent la Manche. Il met au point une drague efficace contre les mines à orin, qui porte son nom. Chef d’Etat-major de la marine en avril 1919, il quitte le service actif en février 1920 et publie l’année suivante ses souvenirs de guerre.

Il meurt à Paris en 1940.




  Le Bataillon des Fusiliers Marins (1916-1918)


Jules Jean-Baptiste Dréan est mobilisé le 15 mars 1915. Il est incorporé au 3ème dépôt des équipages à Lorient en qualité de matelot de 3ème classe. Il approche alors de ses vingt ans (né le 1er juillet 1895) et justifie de cinquante quatre mois et de seize jours de navigation à la pêche.

Le 1er décembre 1915, il est affecté au Bataillon de marche des Fusiliers-Marins qui reste déployé dans le secteur de Nieuport, précédemment tenu par la Brigade des marins. Il parvient au front le 12 janvier 1916.

Jusqu'au printemps 1917, il ne semble pas y avoir d'évènement particulièrement notable dans les Flandres. Au mois de juin, l'État-Major anglais prépare dans les Flandres une offensive de grande envergure, offensive à laquelle la 1ère Armée française prendra part, à la gauche des armées britanniques, en s'intercalant entre celles-ci et le front tenu par les troupes belges. L'attaque est prévue pour le mois de juillet. Le commandant de la 1ère Armée, le Général Anthoine, dispose des 1e et 36e Corps renforcés de bataillons sénégalais et de celui des fusiliers-marins.

A partir du 15 juillet 1917 commencent les tirs de barrage d'artillerie en péparation de l'attaque.

Celle-ci est déclenchée le 31 juillet. Les Sénégalais et les fusiliers-marins, mis à la disposition de la 51e Division, reçoivent pour mission de nettoyer la presqu'île de Poësele. Le formidable pilonnage d'artillerie oblige les Allemands à la désertion de leur première ligne, et les alliés, sous les ordres du maréchal Douglas Haig et des généraux Palmer et Gough, occupent cette ligne sur un front de 24 kilomètres entre la Basse-Ville sur la Lys et Steenstraete sur l'Yser. Les troupes françaises, qui ont franchi le canal de l'Yser, se sont emparrées de Bixschoote, du cabaret de Kortekeert et de Steenstraete, avançant ainsi de 3 kilomètres.

Le 11 août, les fusiliers-marins après avoir enlevé successivement leurs objectifs dans la presqu'île de Poësele, arrivent jusqu'à Drie Gratchen, faisant de nombreux prisonniers. Une contre attaque ennemie, qui tente de déboucher de Merckhem, est rejetée dans les marais. Les marins s'organisent sur les positions conquises, après avoir coupé les passerelles qui enjambent le Martjewaert.

Le 16 août au matin, les troupes du général Anthoine et celles du général Plumer chargent sur les positions ennemies aux alentours de la route de Steenstraete et de Dixmude, traversent le cours d'eau de Steenbeck, où plusieurs fois les ponts jetés et détruits sont reconstruits sous la mitraille. Les Français ont la tâche de faciliter aux Anglais la prise de Langemarck défendu maison par maison par canons et mitrailleuses. Au cours de cette attaque, Jules Dréan est blessé au Pont de Steenstraete, d'une plaie à la jambe droite par éclat d’obus. Il est hospitalisé pour blessures de guerre du 17 août au 21 octobre.

Au soir du 17 août, l'avancée de la 1ère Armée française l'a portée sur une ligne générale : Grande-Écluse, Drie Grachten, limite ouest des inondations du Martjewaert, ferme Carnot, fermes Mondovi et Champaubert, liaison avec le 14e Corps britannique.

Le 3 septembre 1917, le Bataillon des Fusiliers-Marins cantonne à Die Grachten. Quelques uns de ces marins y sont photographiés par Paul Castelneau. Ces photos, en couleur, ont été numérisées et peuvent être trouvées sur le site « Gallica » de la Bibliotèque nationale de France (http://gallica.bnf.fr ; recherche libre : « fusiliers marins »).





Officier des équipages La Feuillie


Le 9 septembre 1917, Jules Dréan est cité à l’ordre du bataillon par le Capitaine de Frégate de Maupéou (photo ci-contre) commandant le Bataillon de Fusiliers-Marins :

DREAN Jules, Mot sans spté, Mle 100085-A

« Soldat plein d’entrain et de bravoure, blessé au début de l’attaque le 16 août 1917 a fait l’admiration de tous par son calme sous le feu et son mépris de la douleur. »




Le 9 octobre, les Britanniques, qui continuent leur offensive, attaquent au nord et à l'est d'Ypres. A leur gauche, partant du nord-est de Bixschoote, les troupes françaises attaquent, sur un front de 2,5 km entre Draïbank et Weindendreft, l'ennemi installé au sud de la forêt d'Houthulst. Malgré les difficultés du terrain et l'atmosphère empoisonnée, elles prennent les villages de Saint-Jean, Mangelaere et Veldhoek. L'avance est de plus de 2 km à l'arrivée sur les lisières sud-ouest de la forêt d'Houthulst. Le 12 octobre, les Anglais rejoignent les Français à la lisière sud de cette même forêt.

Le 22 octobre, Anglais et Français avancent vers Poelcappelle. Le 26, les soldats français attaquent entre Drie Grachten et Draïbank, franchissent le Saint-Jansebek et le Corverberk avec de l'eau jusqu'aux épaules, prennent Draïbank, les bois de Papegoed ; puis le 27, toutes les positions allemandes sur un front de 4 km et une profondeur de 2 km jusqu'aux lisières ouest de la forêt d'Houthulst, en s'emparant des villages de Verdrandesmis, Axhoot, Merkem et Kippe. Le 28 octobre, les alliés avancent de 2 kilomètres sur un front de 4 kilomètres dans la presqu'île du Luyghen. Les Belges occupent les postes de la presqu'île de Merckem, les Français prennent le village de Luyghen ; la presqu'île de Merckem est bientôt aux mains des Alliés.

Au cours de ces combâts, les Fusiliers-Marins, se sont particulièrement illustrés à Langewaede, puisque leur action leur vaudra une troisième citation à l'ordre de l'Armée. [NDLR : ceci est basé  sur l'hypothèse que  les villages dénommés « Langesvade » ou « Langewaede » selon les sources, correspondent effectivement au village « Langewaede » de la presqu'île de Poësele, entre Draibank et Merckem ; cf. la carte].

Le 25 novembre 1917, après une période de convalescence Jules Dréan rejoint sa compagnie.

Le 1er janvier 1918, Jules Dréan est nommé matelot de 2ème classe sans spécialité.

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Avec la fin des hostilités sur le Front Est, Lüdendorff avait planifié une offensive majeure en France au printemps 1918. Transférant autant de troupes que possible depuis l'Est, il pensait pouvoir réaliser une offensive victorieuse sur le Front Ouest avant l'implication massive des Etats-Unis dans la guerre. Il porta son choix sur la partie du front tenue par les Anglais d'Arras à Saint-Quentin et La Fère, qui apparaissait faiblement défendue. L'objectif des Allemands était de séparer les troupes alliées en rejeutant les Anglais vers la Manche et repoussant les Français vers le sud.

L'offensive commence le 21 mars à 4 heures du matin sur un front de 70 km de large. L'avance des Allemands est très rapide sur tout le front. Le 27 mars les Allemands sont à Montdidier, à 60 km de leur point de départ, menaçant Amiens. Mais les alliés, unifiés sous le commandemant unique du Général Foch, jettent de nouvelles forces dans la bataille et parviennent à arrèter l'offensive allemande qui s'épuise. L'offensive de la Somme prend fin le 5 avril 1918, aussitôt suivie à partir du 9 avril par l'offensive de la Lys.

Le Bataillon des Fusiliers-Marins (parmi lequel Jules Dréan) qui a quitté la Belgique, a participé aux combats qui se sont déroulés en avril à proximité du village de Hailles, au confluent de l'Avre et de la Luce, à une quinzaine de kilomètres d'Amiens. Ceux-ci lui ont valu sa quatrième citation à l'ordre du bataillon.


Le 1er mai 1918, Jules Dréan est cité à l’ordre du bataillon par le Capitaine de Corvette Monier commandant le Bataillon de Fusiliers-Marins :

DREAN Jules. Mot S/spté. 100085-A.

« A porté sous le feu de l’ennemi son fusil-mitrailleur sur la crête de la cote 82 le 4 avril 1918, permettant au tireur de tirer sans interruption sur l’ennemi qui cherchait à envelopper la section. »


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Après la seconde bataille de la Marne du 14 au 18 juillet 1918 marquant l'avancée extrême des armées allemandes, l'offensive alliée reprend et s'avance vers les défenses de la ligne Hindenburg d'août à septembre 1918.

Le Bataillon de Fusiliers Marins au sein de la l'Armée Mangin (10ème Armée) stationne dans le secteur de Laffaux, petit village situé sur un mouvement de terrain à l'extrémité ouest du Chemin des Dames, et participe du 12 au 28 septembre à l'offensive de la reprise du Chemin des Dames.

Le 14 septembre 1918, le sinistre Moulin de Laffaux, maintes fois pris et perdu au cours de la guerre, est de nouveau repris par les fusiliers-marins sur le plateau qui sépare les vallées de l'Ailette et de l'Aisne. Un menhir, érigé en 1938 près de la crête où s'installa le PC du bataillon après en avoir délogé les Allemands, rappelle le sacrifice des fusiliers-marins lors de la première guerre mondiale. Une dizaine de mètres derrière ce monument, se trouve l'entrée de la carrière de Fruty où les marins combattirent le 14 septembre 1918.

Le Bataillon de Fusiliers-Marins accompagne l'offensive française jusqu'à Laon, au tout début d'octobre, mais au prix de lourdes pertes puisqu'il perd les trois-quarts de ses officiers (18 tués) et plus de la moitié de son effectif (430 tués).

Le 29 septembre 1918, Jules Dréan est blessé par balle au pied gauche et au mollet droit lors du passage de l’Ailette. Sous le feu des Allemands, n'arrivant plus à avancer, il déclare à ses camarades qu'il est foutu, mais son cousin François Ezanno, autre Etellois de la Brigade des Fusiliers-Marins, l'aide à se mettre à l'abri et lui sauve probablement la vie. Jules Dréan est hospitalisé du 29 septembre au 31 octobre 1918 ; après une permission de 25 jours il rejoint son unité le 13 décembre.

Le 1er novembre 1918, le bataillon est cité pour la cinquième fois à l'ordre de l'Armée pour son action au Moulin de Laffaux.

Le 1er janvier 1919, Jules Dréan est nommé matelot de 1ère classe sans spécialité. Il rejoint le 3ème dépôt des équipages à Lorient le 1er mars 1919, après avoir passé trois ans et trois mois au Bataillon de Fusiliers Marins, puis est affecté au croiseur cuirassé Pothuau à Toulon le 28 mars 1919. Il est renvoyé dans ses foyers le 15 octobre 1919.






Bibliographie


Pour les Fusiliers-Marins pendant la Guerre 1914-18 :

  1. « La France héroïque et ses alliés » aux Editions Larousse (1919).
  2. « La Grande Guerre » de Pierre Miquel.
  3. Site internet de l'Ecole des Fusiliers Marins et Commandos (http://www.netmarine.net/forces/commando/ecole).

Pour la Brigade des Fusiliers-Marins :

  1. « Deuil » de Georges Le Priellec, article paru dans le numéro 70 de La Chaloupe, revue du Cercle généalogique de Sud Bretagne.
  2. « Mémoires pour servir à l’histoire de la guerre de 1914-1918 » de Ferdinand Foch.
  3. « Jours de gloire » de Georges Beaume (document communiqué par « Didier le Chtimiste » http://www.chtimiste.com).
  4. « Histoire de l'île de Groix et de la famille Gouronc », site internet de Enguerrand Gourong (http://enguerrand.gourong.free.fr).
  5. Site internet de l'Ecole des Fusiliers Marins et Commandos (http://www.netmarine.net/forces/commando/ecole).
Pour l'Amiral Ronarc'h :
  1. Site internet de l'Ecole Navale (http://www.ecole-navale.fr/fr/officiers/histoire).
Pour le Bataillon des Fusiliers-Marins :
  1. Livret de solde de Dréan Jules Jean-Baptiste.
  2. « Picardie 14-18 », http://www.chez.com/picardie1418/fr/collectifs/02/laffaux.htm.

A voir également :
  1. Site internet du Musée de Tradition de l'École des FusiliersMarins (http://musee.fusco.lorient.free.fr), notamment sa très intéressante cartophilie.