L'INDOCHINE ET LE COUP DE FORCE JAPONAIS


Roger RUBÈGUE



Par l'intermédiaire de son fils Jérôme, René RUBÈGUE m'a contacté après avoir reconnu sur les photos de l'équipe de football du Tonkin qu’entraînait mon grand-père, son père, Roger RUBÈGUE.

Roger RUBÈGUE est né le 3 mars 1915 à Tamatave (Madagascar). À la fin des années 1930, militaire dans l'artillerie coloniale, il est affecté à Hanoï où il rencontre VU THI LIEN, la mère de ses deux enfants : René naît le 16 avril 1939, il sera suivi un peu plus tard par Jacques, leur deuxième fils. La famille RUBÈGUE vit au n°12, route du champ de course (aujourd'hui rue Ngoc Ha), toute proche de la citadelle, dans la prolongation vers l'ouest du boulevard Giovaninelli.

Entre 1940 et 1945, on retrouve RUBÈGUE dans différentes équipes de football entraînées par Pierre MILLOUR, mon grand-père :

En 1945, le maréchal des logis Roger RUBÈGUE est affecté à la 6e compagnie d'ouvriers d'artillerie coloniale. Dépendant du général directeur du service de l'artillerie, les 6e et 7e compagnies d'ouvriers d'artillerie coloniale, respectivement au Tonkin et en Cochinchine, assurent l'entretien et la réparation de l'armement, la gestion et le stockage des munitions.

D'après René, parmi les amis de son père il y avait des dénommés LEBRAS et GEORGI, ainsi que le capitaine Paul VERNIÈRES qu'il avait rencontré dans le cadre de ses activités sportives. VERNIÈRES, commandant de la 21e compagnie du 3e RTT, sera l'un des principaux artisans de la défense de la citadelle de Langson.

Le matin du 8 mars 1945, Roger RUBÈGUE, qui avait quitté très tôt sa maison de la rue du champ de course, revient chez lui pour prévenir sa famille qu'il part en urgence pour Langson. Quelques minutes plus tard, il prend un pousse-pousse pour retourner dans sa compagnie. Sa famille ne le reverra plus. Pour René, les circonstances précises de la mort de son père, porté disparu, restaient inconnues. Sa mère était persuadée que, comme de nombreux autres soldats français à Langson, il avait été décapité par les Japonais.

Il s'avère qu'en fait, fin mars, RUBÈGUE se trouve dans la région de Sonla où il se porte volontaire pour faire partie d'un commando Action (commando du capitaine BAUDELAIRE de 18 hommes ou commando DAMPIERRE du capitaine parachutiste TOUBAS, fort de 23 hommes) chargé, sous les ordres du lieutenant-colonel VICAIRE, lui-même à la tête d'un troisième commando de 26 hommes, de mener des actions de guérilla sur les arrières des Japonais. Les conditions dans lesquelles ces commandos vont devoir opérer se révéleront extrêmement difficiles et leur mission va tourner au cauchemar. Fin avril, VICAIRE se résigne à prendre la direction de la Chine. Fin mai, lorsque les survivants parviennent enfin à passer en Chine, sur les presque 70 qu'ils étaient au départ, ils ne sont plus que 18. Tous les autres, à l'exception d'un sous-lieutenant et d'un maréchal des logis-chef de la Coloniale et d'un sous-officier parachutiste du groupe DAMPIERRE fait prisonniers, ont été tués. Roger RUBÈGUE fait partie de la vingtaine de soldats tués le 15 mai 1945 dans une embuscade près de Phan Sui Lin, à quelques kilomètres au sud de Phong Tho. (Cf. Philippe Millour & Gaston ERLOM, Le Service Action d'Extrême-Orient 1944-1945 – Premiers parachutistes en Indochine, Paris, Sophia Histoire & Collections, 2022, pp 89 à 97.)


Mariage de Lionel et Henriette (noms de famille inconnus), le 20 avril 1940. À droite, on reconnaît Roger RUBÈGUE en uniforme.

Roger RUBÈGUE et VU THI LIEN en 1942.

Roger RUBÈGUE à Hanoï.

René RUBÈGUE et son petit frère, Jacques, à Hanoï en 1946. En 1950, âgé de onze ans, René sera envoyé à l'École des enfants de troupe de Dalat (EETD) où il suivra une instruction militaire avec d'autres enfants eurasiens.